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Petit immeuble devient grand

Gilles Vigneault, souverainiste dans l’âme, a déjà dit qu’un pays se construit de l’intérieur. Avec les gens et pour des gens.  « Prenez un territoire et décrétez qu’il s’agit d’un nouveau pays. Si personne ne l’habite, ce n’est pas un pays que vous avez, c’est un parking. »
On peut dire la même chose pour l’immobilier. Bâtissez un immeuble doté d’une belle architecture, il ne restera qu’un immeuble jusqu’à la fin de ses jours. Un immeuble sans âme.

Pourquoi des millions de touristes visitent-ils des édifices vides aujourd’hui? Comme Versailles à Paris, le palais des Doges à Venise ou la prison de Londres? Pour l’architecture, c’est vrai, mais aussi  pour l’histoire que l’on respire à travers les murs, pour les gens qui y ont vécu, pour les événements historiques qui s’y sont produits.

Parfois, cela n’a rien à voir avec la taille de l’immeuble, ni le style ni la décoration. Une cabane au fond d’un jardin peut devenir un site historique.

À Paris de nos jours, des milliers de touristes font un détour par la place Émile-Goudeau. Ils s’arrêtent devant un immeuble le long de la rue Ravignan. Ils contemplent une petite façade sombre pourvue d’une vitrine. Au-dessus de la vitrine sont écrits les mots : Le Bateau Lavoir.

Source : Wikipedia photo de Davequ

Juste avant le début des années 1900, le propriétaire entreprend des rénovations pour diviser l’intérieur de l’immeuble en plusieurs ateliers. Puis, il invite les artistes peintres à s’y installer pour travailler. L’immeuble devient leur maison. Le coin est propice à la création. Vignes, potagers et moulins à vent entourent le terrain.

Les artistes viennent de la France, mais aussi de l’Italie, de l’Espagne, des Pays-Bas.  En 1904 se pointe un pur inconnu âgé de 23 ans. Il s’appelle Pablo Picasso. Il habitera l’immeuble pendant cinq ans.

En 1907, trois ans après son arrivée, Picasso peint « Les demoiselles d’Avignon ». Le tableau provoque une révolution. C’est le début d’un nouvel art qu’on appelle le cubisme. Un art qui va marquer tout le nouveau siècle qui débute.

Soudain, le petit immeuble n’est plus un immeuble parmi tant d’autres. D’autant plus que d’autres artistes peintres le fréquentant vont devenir célèbres : Modigliani, Gris, Matisse, Braque pour ne nommer que ceux-là.

Pourquoi lui avoir collé le nom de Bateau Lavoir? C’est que l’immeuble a été bâti sur le flanc d’une colline, celle de Montmartre, ce qui a provoqué une dénivellation importante au niveau de l’étage. De plus, lorsque vous déambulez entre les pièces minuscules de chaque côté d’un long couloir, vous avez l’impression de vous déplacer dans un paquebot.

Quant au mot Lavoir, il serait le fruit de l’imagination de l’écrivain Max Jacob, l’immeuble ne renfermant qu’un seul point d’eau. C’est du moins la version de Wikipedia. Par contre, le petit Robert nous apprend que l’expression bateau lavoir existe vraiment et se définit par les mots suivants : bateau spécialement aménagé pour servir de lavoir.

Attention! Seule la façade sombre est authentique. Une grande partie de l’immeuble a été reconstruite après un incendie en mai 1970.