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Les soucoupes de Brasilia

Cet ensemble futuriste est le parlement du Brésil. La soucoupe à l’envers renferme le Sénat. La soucoupe à l’endroit accueille la Chambre des députés. Les deux gratte-ciel abritent les bureaux des fonctionnaires, des sénateurs et des députés.

iStockphoto LP
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S’il est vrai que le génie réside dans la simplicité, nous devrions illico nous prosterner devant l’architecte brésilien Oscar Niemeyer. Son parlement, qu’on appelle le Congrès national brésilien, est à la fois sobre, élégant et efficace.

C’est donc sous ces coupoles que députés et sénateurs échangent sur la venue prochaine du Mondial de soccer et des Jeux Olympiques de Rio.

Cela n’a aucun sens que sénateurs et députés débattent dans des bâtiments aussi hermétiques, dites-vous? Vous avez raison. Les deux coupoles sont davantage des symboles. Les deux assemblées parlementaires se trouvent dans un espace à moitié souterrain. La coupole dirigée vers le ciel symbolise l’ouverture des députés vis-à-vis le peuple. La coupole retournée vers le sol symbolise la réflexion.

Fidèle à sa philosophie, le Guide du Routard se fait un point d’honneur de transmettre le point de vue du peuple pour qui «le bol renversé évoque des sénateurs rassasiés tandis que son alter ego symbolise des députés qui réclament à manger.»

Le parlement se trouve à Brasilia, capitale du pays. Il faut comprendre Brasilia pour comprendre l’œuvre de Niemeyer. C’est une ville artificielle construite à la vitesse de l’éclair à la fin des années 50. Une idée folle du président de la République de l’époque qui voulait conquérir les terres vierges à l’intérieur du pays. Beaucoup de Brésiliens et de Brésiliennes et des gouvernements étrangers avaient tourné le projet en dérision. De la pure mégalomanie, disaient-ils.

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Niemeyer, une vingtaine d’architectes, des ingénieurs et toute une armée de travailleurs sont partis s’installer à des centaines et des centaines de kilomètres de Rio et de ses plages. Objectif: construire Brasilia. C’était une vie d’exil, comme au Québec à l’époque des grands chantiers de la Baie James. Aucune distraction, vie rudimentaire, peu de famille. Vivant au milieu de nulle part, les travailleurs exilés ont défriché, organisé, construit.

Les premiers matériaux ont été transportés par hélicoptères. Pour l’architecte Oscar Niemeyer, Brasilia était un cadeau du ciel. «J’ai compris que j’avais devant moi une œuvre qui était à la mesure de mon imagination. Y a-t-il un architecte digne de ce nom dans le monde qui aurait refusé de relever un tel défi?», a-t-il déclaré.

Niemeyer avait la responsabilité de construire la plupart des premiers édifices de Brasilia: parlement, immeubles administratifs, cathédrale, musée et bien d’autres. Le monde entier, ayant les yeux tournés vers Brasilia, vit des formes étranges surgir de la terre.

«Ce sont les courbes qui m’ont permis, en travaillant le béton armé, d’exprimer mes émotions», explique Niemeyer qui livrait à l’époque un combat contre l’angle droit. Il ajoute: «L’architecture doit suivre les fantaisies de l’architecte.»

Trois ans après le début des travaux, le président de la république inaugurait Brasilia. On dit que l’homme aimait contempler la ville sous un ciel plein d’étoiles. Ce devait être beau en effet puisque presque tous les premiers édifices étaient de couleur blanche.

Niemeyer raconte que, dans un cinéma français, des spectateurs ont applaudi en voyant  le cœur de Brasilia surgir sous un avion qui le survolait. C’était le film L’homme de Rio avec l’acteur Jean-Paul Belmondo.

Brasilia est une ville spectaculaire, mais elle n’efface pas Rio qui, dans le cœur des Brésiliens, reste la plus belle.

 

Références :

  • Niemeyer par lui-même, L’architecte de Brasilia parle à Edouard Bailby, Balland biographies, Éditions Balland, Paris, 1993,224 pages
  • Brésil, Le Guide du Routard, Hachette, 2013, 659 pages
  • Wikipedia anglais à l’article Oscar Niemeyer
  • Wikipedia anglais à l’article Brasilia
  • Wikipedia anglais à l’article La Place des trois pouvoirs

Photos : iStockphoto LP