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Habiteriez-vous ce logement?

iStockphoto LP
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Récemment, j’écrivais trois billets (voir ci-bas) sur ce qui était peut-être la pire crise de logement de l’histoire des temps modernes en Occident dans des pays comme l’Angleterre, la France, l’Allemagne, la Russie.

Je viens de terminer la lecture du roman Crime et châtiment de Dostoïevski lorsque je suis tombé sur un passage qui m’a arraché un sourire parce qu’il illustre parfaitement cette fameuse crise du logement.

La forme de la chambre décrite par l’écrivain russe est si inusitée que Dostoïevski ne l’a certainement pas imaginée. Cette chambre devait exister et l’écrivain, journaliste et chroniqueur à une certaine époque, a sûrement déambulé dans une telle chambre.

Je vous mets au défi de la dessiner.
La chambre est située dans une maison verte de trois étages donnant sur l’un des canaux de Petersbourg (écrit comme tel dans le livre). Le personnage principal, Raskalnikov, gravit un escalier étroit et sombre jusqu’au deuxième étage. Il marche dans la galerie, entre par l’antichambre et débouche finalement dans la chambre proprement dite appartenant à un tailleur appelé Kapernaoumov qui la loue à une prostituée s’appelant Sonia.

  • «Cette pièce, grande, mais excessivement basse, était la seule louée par les Kapernaoumov, écrit Dostoïevski. Dans le mur de gauche se trouvait une porte donnant accès chez eux. Du côté opposé, dans le mur de droite, il y avait encore une porte, celle-ci toujours fermée. Là était un autre logement, sous un autre numéro. La chambre de Sonia ressemblait à un hangar, elle affectait la forme d’un rectangle très irrégulier, et cette disposition lui donnait quelque chose de monstrueux. Le mur percé de trois fenêtres, qui était en façade sur le canal, la coupait en écharpe, formant ainsi un angle extrêmement aigu, au fond duquel on ne pouvait rien distinguer, vu la faible clarté que répandait la chandelle. En revanche, l’autre angle était démesurément obtus. Cette vaste pièce ne renfermait presque pas de meubles. Dans le coin à droite se trouvait le lit; entre le lit et la porte, une chaise; du même côté, juste en face de la porte du logement voisin, était placée une table de bois blanc recouverte d’une nappe bleue; près de la table il y avait deux chaises de jonc. Contre le mur opposé, dans le voisinage de l’angle aigu, était adossée une petite commode en bois non verni, qui semblait perdue dans le vide. Voilà à quoi se réduisait tout l’ameublement. Le papier jaunâtre et usé avait pris dans tous les coins des tons noirs, effet probable de l’humidité et de la fumée de charbon. Tout dans ce local dénotait la pauvreté; il n’y avait même pas de rideaux au lit».

La pauvreté était si extrême à l’époque que certains propriétaires n’hésitaient pas à louer un «coin» de chambre. Et non la chambre en entier.

Pour ma part, j’ai fui un logement une fois dans ma vie. Rien ne ressemblait à un hangar ou n’évoquait une forme monstrueuse. J’ai fui devant la multitude de coquerelles courant sur le comptoir de la cuisine. J’ai fui même si le propriétaire tentait de me convaincre que tout serait rentré  dans l’ordre la semaine suivante. Les annonces dans les journaux sont parfois très trompeuses.

Un mot sur Dostoïevski : l’écrivain Dan Brown (Le Code Da Vinci et Anges et démons) le cite comme l’un des grands parmi les écrivains aux côtés de Shakespeare.

À lire dans la section immobilier, les trois billets sur la pire crise de logement de l’histoire:
La pire crise de logement de l’histoire?,
Le pire crise de logement de l’histoire (suite), et Au diable les propriétaires!

Référence
Crime et châtiment, Fédor Dostoïevski, La Bibliothèque du collectionneur, editionscaractere.com 2013, 763 pages

Photo: iStockphoto LP