PUBLICITÉ

L’immeuble le plus lourd du monde

Les chiffres sont hallucinants et l’histoire cachée derrière donne le vertige.

Selon le Guinness World Records, le palais du Parlement à Bucarest est le bâtiment le plus lourd de la planète. Il renferme 700 000 tonnes d’acier et de bronze, un million de mètres carrés de marbre, 3500 tonnes de cristal et 900 000 mètres carrés de bois. On l’appelle tantôt le monstre, tantôt la bête, tantôt l’horreur.

Comment un tel immeuble a-t-il pu voir le jour?

Nous sommes en 1977. La terre tremble sous les pieds des habitants de Bucarest. Des quartiers entiers sont ravagés. Bilan: 1500 morts.

Le dictateur communiste de l’époque, Nicolae Ceausescu, utilise le prétexte du tremblement de terre pour réaliser son rêve de grandeur.  S’inspirant des constructions colossales de Pyongyang en Corée du Nord, érigées à la gloire du dictateur King-II Sung, le dictateur roumain décide de faire de Bucarest une ville futuriste.

Ceausescu veut regrouper toutes les institutions politiques du pays sous un même toit. Il ordonne à une armée de bulldozers de raser près du cinquième des quartiers historiques de Bucarest, soit environ cinq kilomètres carrés, faisant disparaître à jamais entre 7000 et 9000 maisons pittoresques et près de trente églises très anciennes.

iStockphoto LP
iStockphoto LP


Le dictateur pousse 40 000 Roumains vers de nouveaux immeubles parfois insalubres, sans eau ni électricité. La construction du palais a provoqué un véritable traumatisme collectif, comme le souligne l’auteure Diane Chesnais: «Le souvenir des démolitions massives et des sacrifices consentis pour son édification reste encore vivant dans la mémoire collective.»

La construction a débuté en 1984. Pendant cinq ans, 20 000 ouvriers travaillent jour et nuit, souvent dans des conditions précaires, sous la direction de quelque 600 architectes et ingénieurs. Ceausescu a trouvé un nom à l’immeuble: la Maison du peuple.

iStockphoto LP
iStockphoto LP

Les travaux ont grugé annuellement jusqu’à 40% du produit intérieur brut de l’économie roumaine, provoquant la ruine du pays. D’après Wikipedia, «des carrières de marbre et en particulier de rare marbre rose sont épuisées; des villages entiers sont mis à contribution, par exemple pour le façonnage de cristal ; des monastères de nonnes sont affectés par exemple au tissage des longs rideaux de soie et de fil d’or.»

Le guide Michelin décrit l’intérieur du bâtiment de façon truculente: des tapis vastes comme des prés,  1200 salles aux dimensions d’un terrain de football et des lustres comme des astres. Selon le guide The Rough Guide to Romania, un escalier est refait trois fois pour plaire au couple Ceausescu. Selon Lonely Planet, lorsque le bâtiment était éclairé dans les années 80, il consommait en 4 heures autant d’électricité que la ville de Bucarest en une seule journée. Le guide affirme aussi qu’un abri antiatomique se trouve à 20 mètres de profondeur. Ce à quoi Gallimard ajoute que les différents niveaux au sous-sol atteignent 92 mètres de profondeur, où des condamnés à mort ont percé des passages secrets.

Le communisme tombe en 1989. Des milliers de Roumains en colère saccagent et pillent le palais. Ceausescu et son épouse sont fusillés sur la place publique.

Que fait-on du palais? Comme il n’est pas terminé, on songe à le détruire. Surprise: le démolir coûterait trop cher. Donald Trump a bien voulu en faire le plus grand casino du monde mais l’offre a été refusée.  On décide finalement d’y aménager la Chambre des députés roumaine, le Sénat, des musées et autres institutions.

L’immeuble est tellement immense que des pièces entières ne sont toujours pas utilisées, ni entretenues. Et les visiteurs n’ont accès qu’à 7% du bâtiment.

 

Références:

Guinness World Record, édition 2012, page 90

Roumanie, Michelin, collection Le guide vert, Paris, 2012, 462 pages

Roumanie, Lonely Planet, 2010, 364 pages

Roumanie, Guide Évasion, 2009, 303 pages

The Rough Guide to Romania, 2008, 519 pages

Roumanie, bibliothèque du voyageur Gallimard, 2008, 384 pages

Roumanie, Le petit futé, Paris, 2012-2013, 528 pages

Romania, National Geographic Traveler, 271 pages

Roumanie d’hommes et de lumières, Olivier Bourguet, éditions Vilo, 201, 221 pages

Voyage en Roumanie, Alain Kerjean, éditions Glénat,  2007, 158 pages

Wikipedia à l’article français Le palais du Parlement

 

Photos: iStockphoto