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La maison dansante de Prague

Dansent-ils le tango, la rumba ou le fox trot? À première vue, un esprit pourvu d’une grande imagination y voit deux danseurs côte à côte, celui de droite enlaçant celui de gauche par la taille. C’est l’image qui se dégage de l’immeuble à bureaux Nationale-Nederlanden, surnommé la maison dansante de Prague.

L’esprit imaginatif a raison sur toute la ligne. Il s’agit bel et bien de deux danseurs représentés par deux tours étroitement serrées l’une contre l’autre. À droite, c’est l’homme qu’on appelle Fred; à gauche, c’est la femme appelée Ginger.  Les passionnés de comédies musicales auront deviné qu’il s’agit de Fred Astaire et de Ginger Rogers, le célèbre couple de danseurs américains.

Lors de l’inauguration de l’édifice en 1996, on désignait les deux tours par les noms de Fred et Ginger. Mais les Tchèques préféraient appeler l’immeuble « la maison qui danse ».

Maison dansante Prague. Source: Wikipedia Chosovi

Remarquez le renflement vers le haut de la tour de droite. Il s’agit des pectoraux de Fred.

La féminité de sa partenaire de danse Ginger s’exprime par le jeu de courbes et le choix du verre comme matériau de construction. Le robuste Fred, lui, est composé de quatre-vingt-dix-neuf panneaux de béton, formant un seul bloc monolithique.

Remarquez aussi les belles jambes de Ginger au pied de l’immeuble de verre.  On dirait que les piliers effectuent un léger pas de danse.  Il y a aussi le chapeau de Fred constitué par le dôme, masculinisant davantage la tour de droite.

Pourquoi avoir choisi la danse comme thème architectural?  Pour souligner le caractère festif de la Révolution de velours en 1989 à la faveur de laquelle les Tchèques se sont libérés du joug communiste.

L’idée avait fleuri dans la tête de l’écrivain Vaclav Havel, célèbre dissident à l’époque communiste.  Havel avait vécu dans l’immeuble voisin. Le site de la maison dansante avait été bombardé durant la guerre 39-45 et laissé vacant pendant toutes ces années. Devenu président de la République tchèque après la révolution, Haval avait donné son soutien au projet de l’architecte américano-canadien Frank Gehry.

Même si le magazine américain Time consacrait le bâtiment « meilleur design de l’année » en 1996,  le style de l’immeuble ne faisait pas l’unanimité parmi les habitants de Prague au début, comme c’est souvent le cas avec les architectures un tantinet excentriques.  Finalement, l’immeuble a traversé l’épreuve du temps. La preuve : la Banque nationale tchèque a frappé une pièce en or en 2005 à l’effigie de la maison dansante dans le cadre de la série « Dix siècles d’architecture ».

Situées sur les quais de la rivière Vltava, les deux tours s’ajoutent à la multitude de tours de Prague, qu’on surnomme « La ville aux cent tours ».